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artist : various DOLORES

Release date : September 12, 2025
genres : Salsa, guaracha Matinique, Guadeloupe
format : CD/ LP/ DIGITAL
reference : BB183

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DOLORES – Salsa & Guaracha from 70’s French West Indies

 

 

 

 

 

 

 

////////////////ENGLISH /////// SPANISH/////////////BELOW//////

En Guadeloupe, ils sont plus d’un à penser que le jazz et le ka, c’est bague et doigt. On pourrait aisément appliquer pareille sentence entre les musiques dites latines et celles du terroir des Antilles Françaises, tant le cousinage sonne de la plus belle évidence entre ces deux esthétiques cousines, nées dans l’arc caribéen. En la matière, des plus fécondes, les exemples sont légion qui illustrent une histoire de connexion frappée du sceau du bon sens commun. Et cela ne remonte pas à hier quand on songe au fait que la contredanse pratiquée dans les salons européens prit pour noms kadrille en Martinique et contradanza à Cuba, toutes deux fondées sur l’ajout de percussions héritées de la déportation transatlantique. Comment en effet imaginer que ces deux entités n’aient pas une base de dialogue naturelle, sur la foi de sentiments partagés autour d’une même identité traumatisée, puis créolisée ?

La question est d’ailleurs vite tranchée si l’on se remémore l’âge d’or des orchestres qui firent les belles nuits du Pigalle de l’entre-deux-guerres. Don Barreto, natif de La Havane, mêla ainsi naturellement dès les années 1930 danzón et biguine, dans son combo basé au Melody’s Bar. Et dans la décade suivante, Félix Valvert, chef d’orchestre grandi à Basse-Terre en Guadeloupe, fit merveille avec l’orchestre bigarré de la Coupole, à Montparnasse. Il n’était pas rare que les musiciens de la sphère afro-caribéenne soient associés dans des sections, rythmiques comme soufflants, censées animer les bals typiques de la capitale : Le Rico Creole’s Band en est un exemple, dès les années 1930, tout comme celui du violoniste-clarinettiste martiniquais Ernest Léardée, futur roi de la biguine, accueillait au Bal Blomet des Caribéens de toute provenance, du type susceptibles de satisfaire ces Zazous-là, pour paraphraser la biguine-calypso de celui qui deviendra l’Oncle Ben’s, sinistre stigmate des a priori post-coloniaux.

Aux Antilles l’histoire s’accélère à partir des années 1950, avec l’accroissement des échanges commerciaux et l’essor des ondes radio. Sur les bons vieux postes à galène, les jeunes Guadeloupéens et Martiniquais se branchent sur les musiques sud-américaines et caribéennes, tandis que les pacotilleuses, ces femmes, commerçantes qui allaient d’île en île, achetant des marchandises ici, pour les revendre ailleurs (« le plaisir est dans le changer de mains »), rapportent dans leurs bagages des sons. C’est le cas de Mme Balthazar de retour de Porto Rico avec les premiers 45-tours et 33-tours sur le sol martiniquais… De cette aventure naîtra d’ailleurs le fameux label martiniquais La Maison des Merengues, une affaire qu’elle entreprendra avec son mari et qui fera date.

En cette fin des années 1950, Marius Cultier glane haut la main le premier prix du Piano International Contest in Puerto Rico : au programme une version du Round ‘Midnight de Monk. Cette distinction annonce tout ce qui va suivre quand on mesurera bientôt que Cultier, comme l’hérétique moine du jazz, a dans les mains une faculté à écrire de superbes mélodies, toujours avec un décalage qui leur donne cette touche unique. Bientôt l’autodidacte surdoué accompagnera Los Cubanos et se fera remarquer pour sa faconde sur les merengues. On connaît la suite. Toujours à l’orée des années 1960, Frantz Charles-Denis, plus reconnu sous le prénom de Francisco, né dans la haute bourgeoise de Saint-Pierre, est rentré au pays après avoir pratiqué la Cabane Cubaine, rue Fontaine, où il a chopé la fièvre latine. Résultat : Francisco imprime sa marque de fabrique, à l’image des cousins cubains, et les combos qu’il pilote affichent une différence de style qui sonne l’heure du renouveau. Ça swingue dru du côté de la Savane, la grand place de Fort-de-France. Et c’est précisément à quelques brassées de là qu’il va monter le Shango, où il teste une nouvelle formule, la biguine lélé, fortement épicée de rythmiques latinos pour celui qui ne tardera pas à s’envoler pour Porto-Rico puis au Venezuela. Quant au percussionniste (entre autres activités) Henri Guédon, né à Fort-de-France le 22 mai 1944, jour anniversaire de l’abolition de l’esclavage, il se souvenait à l’hiver de sa vie que « dans le Teppaz paternel tournait un 6/8 trépidant… » Les premières lignes de sa “Lettre à Dizzy”, un petit recueil illustré de dessins (Del Arco), témoignent du déclic que produit en 1960 le cubop sur cet adolescent, futur lider maximo de la Contesta, big band imbibé de latin jazz et géniteur du mot zouk, qui va apporter le son du barrio new-yorkais en terre parisienne. Comme l’aboutissement d’un parcours commencé du côté de Sainte-Marie, « lieu mythique du bélé, l’équivalent du guaguancó cubain ».

Au début des années 1960, alors que l’économie tertiaire se développe au détriment des activités agricoles, terroir fertile des musiques racines en Martinique comme en Guadeloupe, des maisons de disques vont jouer le rôle de catalyseur de la vague des versions latines, qui déferlent sur les îles comme partout ailleurs. Il y eut notamment le producteur Célini (le formidable label Aux Ondes) et Marcel Mavounzy, frère du fameux soufflant Robert et patron des disques Émeraude, firme créée en 1953. Il y en aura bien d’autres, dont on trouve traces ici même, mais on ne manquera pas de pointer le rôle majeur d’Henri Debs qui se lance dans l’aventure discographique, avec un tel écho qu’il sera comparé par certains à Berry Gordy. Celui dont les premières compositions (un boléro et un chachacha alors qu’il vient d’acquérir son premier Teppaz) remontent au milieu des années 1950 sera le passeur des musiques caribéennes, le calypso comme le merengue, pas peu fier d’accueillir in situ des membres de la Fania All Stars, allant très tôt acheter ses disques à San Juan (Porto Rico) et les diffusant bien vite aussi à Fort-de-France via une enseigne tenue par un de ses frères. C’est aussi lui qui sera bientôt tout ouïe de la musique haïtienne, le compas direct puis les cadences qui vont sitôt inonder le marché. Résultat : nombres des combos passés en son mythique studio seront dopés à la variété des rythmiques « afro-latines ». Et ce sans renier son identité : les tambours gwo ka, instruments longtemps bannis des circuits « officiels », y tiennent une bonne place.

C’est ce fourmillement créatif dont témoigne cette présente sélection, quatorze titres pour un brassage aussi intempestif qu’inédit, où toutes les musiques de l’archipel créole entrent à un moment ou à un autre en piste. Qu’elles soient d’essence rurale ou d’extraction plus urbaine, toutes rappellent « la trace du chant confisqué par l’esclavage » dont parlait Edouard Glissant lors d’un entretien autour de la place de musiques antillaises dans la sphère afro-américaine. « C’est le cas du jazz, mais aussi du reggae, du calypso, de la biguine, de la salsa… Cette trace s’exprime aussi dans les tambours : guadeloupéen, dominicain, jamaïcain, cubain… Aucun n’est le même, tous repartent de cette idée de trace, la cherchent et se mettent en relation. C’est cela qui est la marque de la diaspora africaine : cette capacité à créer de l’inédit par rapport à elle-même à partir d’une trace. Ce peut être le souvenir d’un rythme, la fabrication d’un tambour, une manière de dire qui utilise non pas l’ancienne langue mais les modalités de celle-ci. »

En ouverture, on retrouve ainsi l’un des orchestres emblématiques de cette identité esthétique aux intersections de bien des musiques de ce prolifique archipel. Malavoi, mythique groupe foyalais, interprète en 1974 une superbe guajira de Ray Barretto, tambour majuscule de la scène new-yorkaise qui fut biberonné de Charlie Parker et Chano Pozzo. Et comme un symbole de cette réunion, la conclusion de cette compilation est signée par Los Martiniqueños de Francisco. Poteau mitan de la culture martiniquaise et militant impénitent des musiques afro-caribéennes, pratiquant les rondes de danmyé (sorte de capoeiria) au rythme du tambour bèlè, ce dernier envoie une terrible Caterete, une espèce de champeta d’obédience afro-colombienne composée par le Colombien Fabián Ramón Veloz Fernández pour le groupe Wgenda Kenya. Cerise sur le gâteau : le Brésilien Marku Ribas qui trouva refuge en Martinique au début des années 1970, donne de la voix sur ce titre qui incite à la transe.

Ces deux « versions » fournissent le diapason de cette sélection, composée entre raretés et classiques du genre tropicalisé. Un cocktail que les Antillais ne manquent jamais d’épicer de leurs propres ingrédients, accents toniques comme rythmiques alambiquées. C’est le cas de la reprise de Dónde, célèbre thème cubain composé par le producteur Ernesto Duarte Brito, violon typique et voix piquante – Joby Valente, chanteuse martiniquaise de renom – pour ce qui est à notre connaissance l’unique 45-tours des Los Caraïbes. Quant à L’Ensemble Tropicana, qui regroupait des Haïtiens à l’instar du compositeur et leader Michel Desgrotte, son explicite Amor en chachachá rappelle au milieu des années 1960 la persistance de cette musique sous les tropiques. Ils firent danser aussi bien le Cocoteraie de Guadeloupe que la Bananeraie en Martinique. A la même époque, un autre band « étranger », le Ryco Jazz du Congolais Freddy Mars N’Kounkou, fit des passages remarqués dans les deux îles, parcourant lui aussi les classiques latin jazz à l’image de cette adaptation du Wachi Wara, une soul sauce de Dizzy Gillespie et Chano Pozo. Difficile de ne pas s’élancer sur la piste aux sons entremêlés des cordes et percussions. Tout comme on ne résiste pas à Dap Pinian, un surpuissant guaguancó d’Eugene Balthazar par l’Orchestre Tropicana publié sur la Maison des Merengues, fondée en Martinique. Tout un symbole du maelstrom à l’œuvre.

Sous le nom de Paco et L’orchestre Cachunga, Roger Jaffory s’adonne tout autant au guaguancó, avec Oye mi consejo, un titre d’inspiration de la Fania, entre autres. Baila !!!!! La danse, c’est aussi tout l’à-propos des Kings – pas moins – qui interprètent Oriza, une bomba portoricaine du trompettiste nuevayorquino Ernie Agosto, un « classique » au lustre bien cuivré. C’est aussi dans le chaudron des barrios new-yorkais que La Perfecta, groupe martiniquais originaire de la Trinité, a trouvé son nom, référence directe à La Perfecta du totémique Eddie Palmieri. Les voilà ici qui empruntent Toumbadora au producteur et compositeur colombien Efraín Lancheros, où plus encore que les soufflants ce sont les percussions qui alimentent le feu. On en dira tout autant des Super Jaguars de la Martinique qui prennent prétexte de Tatalibaba, une composition du guitariste Cubain Florencio « Picolo » Santana, rendu célèbre par Celia Cruz & La Sonora Matencera, pour envoyer des cadences infernales. Dans un registre plus typiquement salsa, le Super Combo, fameux orchestre guadeloupéen originaire de Pointe-Noire et formé autour de la famille Desplan, Roger Plonquitte et Elie Bianay, adapte Serana, un thème de Roberto Angleró Pepín, compositeur, chanteur et musicien portoricain connu également pour son titre Soy Boricua. Là encore, leur vision n’est pas loin de surpasser l’originale.

Au virage relevé des années 1970, L’Ensemble Abricot fut le temps d’une poignée de titres au sommet de cet art de varier les plaisirs : boléros, biguines, compas direct, guaguancó et puis un bon vieux boogaloo, « pour toujours » comme ils disent en chœur. L’ensemble martiniquais rassemblé autour de Léon Bertide excelle sur celui composé par le saxophoniste portoricain Hector Santos pour le mythique groupe El Gran Combo. Trois ans plus tard, en 1972, Henri Guédon s’attaque au Bilongo rendu célèbre par Eddie Palmieri, avec le soutien de Paul Rosine au vibraphone. Classique !!!!! Un qualificatif qui colle aux Aiglons guadeloupéens. Suivant un tempo plus à la coule que l’original – à commencer par le clavier merveilleusement (dé)calé en lieu et place de l’accordéon –, ils rejouent Pensando en tí, composition du Dominicain Aniceto Batista. Sur l’étiquète du 45-tours des plus recherchés, le premier publié par Les Aiglons sous étiquète Duli Disc, le titre est placé sous l’appellation générique « afro ». Tout un symbole.

Jacques Denis

/////////////ENGLISH/////////////////////

In Guadeloupe, many people think that jazz and ka music are like a ring and a finger. To some extent, the same could be said about so called Latin music and the music played in the French West Indies. Both aesthetics were born in the Caribbean and bear so many connections that they can easily be considered cousins. In constant dialogue, there are lots of examples of their fruitful alliance and have been for a while. The English country dance that used to be practiced in European lounges came to be called kadrille in Martinique and contradanza in Cuba. They both featured additional percussion instruments inherited from the transatlantic deportation. Drawing from shared feelings about the same traumatized identity – later to be creolized – it would be hard not to assume that they were meant to inspire each other.
The golden age of the orchestras that graced the Pigalle nights during the interwar period further proves the point. As soon as the 1930s, Havana-born Don Barreto naturally mixed danzón and biguine music in a combo based at Melody’s Bar. In the following decade, Félix Valvert, a conductor who was born and raised in Basse-Terre in Guadelupe, also worked wonders in Montparnasse with La Coupole, which was an orchestra made up of eclectic musicians. Afro- Caribbean performers of various origins were often hired on rhythm and brass sections in jazz bands, which used to enliven the typical French balls of the capital. In the 1930s and onwards, Rico’s Creole Band was one of them. Martinican violinist-clarinettist Ernest Léardée, who would become the king of biguine music as well as the main figure of French Uncle Ben’s TV commercials (a dark stigma of post-colonial stereotypes), had musicians from the whole Caribbean sphere play at his Bal Blomet – and they all enchanted “ces Zazous-là” (according the words of Léardée’s biguine-calypso piece).

In les Antilles (French for French West Indies), music history started to speed up in the 1950s, when trade expanded and radio stations grew bigger. The Guadelupean and Martiniquais youth tuned in their old galena radio sets to South American and Caribbean music. As for the women traders, les pacotilleuses, they bought and sold goods across different islands (the “passing of items through various hands” was thought to be most pleasurable) and brought back countless sounds in their luggage. Such was the case of Madame Balthazar, who once returned from Puerto Rico with the first 45rpm and 33rpm to ever enter Martinique. Out of this adventure was created the famous Martinican label La Maison des Merengues, a music business she opened and undertook with her husband and which proved to be a major landmark.
At the end of the 1950s, in Puerto Rico, Marius Cultier competed in the Piano International Contest playing a version of Monk’s Round ‘Midnight. He won the first prize and this distinction foreshadowed everything that was to come. Cultier, the heretic Monk of jazz, was quickly praised for writing superb melodies, always tinged with a twist that conferred a unique sound to his music. It didn’t take long for the gifted self-taught musician to get to play with Los Cubanos, making a name for himself thanks to his impressive maestria on merengues. The rest is history. Besides, in the late 1950s, Frantz Charles-Denis, born into the upper middle class in Saint-Pierre and better known by his first name Francisco, went back home after working at La Cabane Cubaine – a club located rue Fontaine where he had caught the Latin fever. Francisco’s music was therefore heavily marked by his Cuban cousins’ influence, which gave the combos he led a

specific style and also led to renewal. Things were swinging hard in La Savane, located in the main square in Fort-de-France. He set up the Shango club close by and tested out the biguine lélé there, a new music formula spiced up with Latin rhythms. Soon afterwards, fate had him fly to Puerto Rico and Venezuela. As for percussionist Henri Guédon (percussions were only a part of his many talents), he was born in Fort-de-France in May 22nd 1944, the day marking the celebration of the abolition of slavery. As an old man, he could remember that in ” [his] father’s Teppaz, a lot of hectic 6/8 music was constantly playing…”. In the opening lines of his Lettre à Dizzy, a small illustrated collection of writings published by Del Arco, he highlighted the huge impact that cubop had on him as a teenage boy, around 1960. He eventually turned out to be the lider maximo in La Contesta, a big band steeped in Latin jazz. He was also the one who originated the word zouk to describe music which brought the sound of the New York barrio to Paris. It was the culmination of a journey that started in Sainte-Marie: “a mythical place for bélé, the equivalent of Cuban guaguancó”.
In the early 1960s, the tertiary economy developed to the detriment of agriculture. Yet rural life was where roots music emerged in Martinique and in Guadeloupe. Record companies played a major part in the process of Latin versions sweeping across the islands – before reaching everywhere else. Producer Célini, boss of the great Aux Ondes label, and Marcel Mavounzy, both the head of Émeraude records – a firm which was founded in 1953 – as well as the brother of famous saxophonist Robert Mavounzy, were big names to bear in mind. Although there were many of them – all of whom are featured on this record – Henri Debs was definitely the major figure in the recording adventure. He proved to be so influential that he even got compared to Berry Gordy. In the mid 1950s, when he acquired his first Teppaz, he worked on his first compositions: a bolero and a chachacha. Then, he became the one man who made people discover Caribbean music, from calypso to merengue. He was among the first ones to rush out to San Juan, Puerto Rico, to buy records and distribute them through a store run by one of his brothers in Fort-de-France. He had members of the Fania All Star come and perform there, which he was madly proud about. He was also the first one to pay attention to Haitian music, such as compas direct and various other rhythms which would soon flood the market. As a result, many of the combos hitting his legendary studio would end up boosted by widespread “Afro-Latin” rhythms. However, he never denied his identity: gwo ka drums were given a major role, although they were instruments which had long been banned from the “official” music spheres.

The present selection bears witness to such a creative swarming. Here are fourteen tracks of untimely yet unprecedented cross-fertilization: all types of music rooted in the Creole archipelago have found their way, whatsoever, to the tracklisting. Whether originating from the city or being more rural, they all go back to what Edouard Glissant, in an interview about the place of West Indian music in the Afro-American scope, called “the trace of singing, the one which got erased by slavery.” “It is so in jazz, but also in reggae, calypso, biguine, salsa… This trace also manifests through the drums, whether Guadelupean, Dominican, Jamaican or Cuban… None of them being quite the same. They all point to the idea of a trace, seeking it out

and connecting to each other through it. This is the hallmark of the African diaspora: its ability to create something new, in relation to itself, out of a trace. It may be the memory of a rhythm, the crafting of a drum, a means of expression which doesn’t resort to an old language but to the modalities of it.”
The opening track features one of the emblematic orchestras of this aesthetic identity, criscrossing many music types from the archipelago. The 1974 Ray Barretto guajira – Ray Barretto was a major New York drummer influenced by Charlie Parker and Chano Pozzo – is magnificently performed by Malavoi, a legendary Fayolais group (i.e from Fort-de-France). Additionally, the compilation ends on a piece by Los Martiniqueños de Francisco. It symbolically closes the circle as it is a genuine potomitan of Martinique culture which also functions as a tireless campaigner for Afro-Caribbean music. Practicing the danmyé rounds (a kind of capoeiria) to the rhythm of the bèlè drum, it delivers a terrific Caterete, a kind of champeta of Afro- Colombian obedience which was originally composed by Colombian Fabián Ramón Veloz Fernández for the group Wgenda Kenya. The icing on the cake is Brazilian Marku Ribas, who found refuge in Martinique in the early 1970s, bringing his singing to the last trance-inducing track.
These two “versions” convey the whole tone of a selection composed of rarities and classics of the tropicalized genre, swarming with tonic accents and convoluted rhythms. It is the sort of cocktail that the West Indians never failed to spice up with their own ingredients. For instance, the Los Caraïbes cover of Dónde, a famous Cuban theme composed by producer Ernesto Duarte Brito, has a typical violin and features renowned Martinique singer Joby Valente and his piquant voice. The track used to be – or so we think – their only existing 45rpm. The meaningful Amor en chachachá by L’Ensemble Tropicana, a band which included Haitian musicians among whom was composer and leader Michel Desgrotte, also recalls how Latin music was pervasive in the tropics in the mid-1960s. They were the ones keeping people dancing at Le Cocoteraie in Guadelupe and La Bananeraie in Martinique. Around the same time, another “foreign” band, Congolese Freddy Mars N’Kounkou’s Ryco Jazz, achieved some success on both islands by covering Latin jazz classics – such as their adaptation of Wachi Wara, a “soul sauce” by Dizzy Gillespie and Chano Pozo whose interweaving of strings and percussions can have anyone hit the dancefloor. How can you resist Dap Pinian indeed, a powerful guaguancó by Eugene Balthazar, performed by the Tropicana Orchestra and published by the Martinique-founded La Maison des Merengues? It also acts as a symbol of the maelstrom at work.
Going by the name Paco et L’orchestre Cachunga, Roger Jaffory used to play guaguancó too: his Fania-inspired Oye mi consejo is one example of his style. Baila!!!!! Dancing was also one of the Kings’ focus points. Oriza is a Puerto Rican bomba and a “classic” originally composed by Nuevayorquino trumpeter Ernie Agosto, which reserves major space for brasses, giving it a special sheen. Emerging from the New York barrios crucible was also La Perfecta, a Martinique group originating from Trinidad, whose name directly references the totemic Eddie Palmieri figure as well as his own band, also called La Perfecta. Here they borrow Toumbadora from Colombian producer and composer Efraín Lancheros and interpret it by emphasizing percussions, which set fire to the track even more than the wind instruments. The same goes for Martinique’s Super Jaguars, who use Tatalibaba – a composition by Cuban guitarist Florencio “Picolo” Santana which was made famous by Celia Cruz & La Sonora Matencera – as a pretext for sending their cadences into a frenzy. In a more typically salsa vein, the Super Combo, a famous Guadelupean orchestra from Pointe-Noire that was formed around the Desplan family and had Roger Plonquitte and Elie Bianay on board, adapt Serana, a theme by Roberto Angleró Pepín, a Puerto Rican composer, singer and musician also known for his song Soy Boricua. Here again, their vision comes close to surpassing the original.


In the 1970s, L’Ensemble Abricot provided a handful of tracks of different syles, hence reaching the pinnacle of the art of achieving variety and giving pleasure. They played boleros, biguines, compas direct, guaguancó and even a good old boogaloo – the type they wanted to keep close to their hearts for ever, “pour toujours”, as they sang along together in one of their songs. Léon Bertide’s Martinican ensemble excelled at the boogaloo which had been composed by Puerto Rican saxophonist Hector Santos for the legendary El Gran Combo. Three years later, in 1972, Henri Guédon, with the help of Paul Rosine on the vibraphone, tackled the Bilongo made famous by Eddie Palmieri. Such a classic!!!!! And so were the Aiglons, the band from Guadelupe: choosing to execute Pensando en tí, a composition by Dominican Aniceto Batista, on a cooler tempo than the original, they noticeably used a wonderfully (un)tuned keyboard in place of the accordion. On the high-value collectible single – the first one released by Les Aiglons under the Duli Disc label – there is a sticker classifying the track under the generic name “Afro”. Now that is what we call a symbol.

Jacques Denis
Translated into US English by Chloé Labaye

///////////////SPANISH//////////////////////////

En Guadalupe hay más de uno que piensa que el jazz y el ka son la combinación perfecta. La misma idea podría aplicarse entre las músicas llamadas latinas y aquellas de la región de las Antillas Francesas, ya que la relación de parentesco resuena con la más bella evidencia entre estas dos estéticas hermanas, nacidas en el arco caribeño. En este ámbito, de los más fecundos, los ejemplos son legión e ilustran una historia de conexión marcada por el buen sentido común. Y esto no pasó ayer, cuando imaginamos el hecho de que la contradanza practicada en los salones europeos tomó por nombre kadrille en Martinica y contradanza en Cuba, estas dos basadas en la añadidura de percusiones heredadas de la deportación transatlántica. ¿Cómo, en efecto, imaginar que esas dos entidades no tengan una base de diálogo natural, sobre la fe de sentimientos compartidos alrededor de un mismo trauma, y luego creollizado?

La pregunta se resuelve rápidamente si nos remontamos a la edad de oro de las orquestas que hicieron las bellas noches del Pigalle entre las dos guerras. Don Barreto, nativo de La Habana, fusionó naturalmente desde los años 30 rumba y beguina, en su combo basado en el Melody’s Bar. Y en la década siguiente, Félix Valvert, jefe de orquesta que creció en Basse-Terre, hizo maravillas con la orquesta colorida de la Coupole, en Montparnasse. No era raro que los músicos de la esfera afro-caribeña fueran asociados en secciones, tanto rítmicas como de viento, para animar los bailes típicos de la capital. Desde los años 1930, el Rico Creole’s Band es un ejemplo, al igual que el del violinista-clarinetista martiniqués Ernest Léardée; el futuro rey de las beguinas, acogía en el Bal Blomet a caribeños de toda procedencia, siempre que pudieran satisfacer a estos “zazous”, parafraseando la beguina-calipso de quien se convertiría en Oncle Ben’s, un estigma siniestro de los a priori poscoloniales.

En las Antillas la historia se acelera a partir de los años 1950, con el incremento de los intercambios comerciales y el apogeo de la radio. En los viejos radios de galena, los jóvenes guadalupenses y martiniqueses se conectan a las músicas de América del Sur y del Caribe, mientras que las “pacotilleuses”, esas mujeres comerciantes que iban de isla en isla, comprando mercancías para venderlas en otros lados (“el placer se encuentra en el intercambio a través de las manos”), traen consigo en sus equipajes sonidos. Este es el caso de Mme Balthazar, de vuelta de Puerto Rico con los primeros 45 y 33 revoluciones en el suelo martiniqués… De esta aventura nacerá por cierto el famoso sello martiniqués La Maison des Merengues, negocio que ella emprenderá con su esposo y que marcará un hito.

Al final de los años 1950, Marius Cultier gana de manera rotunda el primer premio del Piano International Contest en Puerto Rico: en el programa, una versión de Round ‘Midnight de Monk. Esta distinción anunció todo lo que vendrá, cuando rápidamente se comprendió que Cultier, herético monje del jazz, tenía en sus manos la facultad de escribir hermosas melodías, siempre con una diferencia que les daba ese toque único. Pronto, el autodidacta superdotado acompañará a los Cubanos y se destacará por su elocuencia en los merengues. Lo demás es historia.

Todavía a principios de los años 1960, Frantz Charles-Denis, mejor conocido por el nombre de Francisco, nacido en la alta burguesía de Saint-Pierre, regresó al país después de haber practicado en La Cabane Cubaine, en la rue Fontaine, donde contrajo la fiebre latina. Es así que Francisco imprime su sello distintivo, a la imagen de sus hermanos cubanos, y los combos que dirige muestran una diferencia de estilo que marcará la hora de la renovación. Se baila intensamente del lado de la Savane, la gran plaza de Fort-de-France. Y es precisamente a algunas brazadas de ahí que él montará el Shango, donde intentará una nueva fórmula, la biguine lélé, fuertemente condimentada con ritmos latinos, para aquél que no tardará en volar a Puerto Rico y luego a Venezuela. En cuanto al percusionista (entre otras actividades) Henri Guédon, nacido en Fort-de-France el 22 de mayo de 1944, día del aniversario de la abolición de la esclavitud, recordaba en el invierno de su vida que “en el Teppaz paterno daba vueltas un 6/8 trepidante…” Las primeras líneas de su Lettre à Dizzy, un pequeño libro ilustrado con dibujos (Ediciones Del Arco), dan fe del impacto que produjo en 1960 el cubop en este adolescente, futuro líder máximo de la Contesta, big band empapada de latin jazz y creadora de la palabra zouk, que llevará el sonido del barrio neoyorquino a tierra parisina. Como la culminación de un recorrido comenzado del lado de Sainte-Marie, “lugar mítico del bélé, equivalente del guaguancó cubano”.

A principios de los años 1960, mientras la economía terciaria se desarrolla en detrimento de las actividades agrícolas – terreno fértil de las músicas de raíz en Martinica y Guadalupe – algunas compañías discográficas jugarán el papel de catalizador de la ola de versiones latinas que invadirán las islas y otros lugares. Entre ellas estuvo particularmente el productor Célini (el formidable sello Aux Ondes) y Marcel Mavounzy, hermano del famoso soplador Robert y dueño de Disques Émeraude, compañía creada en 1953. Habrá otros tantos más, cuyos rastros encontramos aquí mismo, pero no olvidaremos señalar el papel primordial de Henri Debs, quien se lanzó en la aventura discográfica con tal eco que será comparado por algunos con Berry Gordy. Aquel cuyas primeras composiciones (un bolero y un chachachá, recién habiendo adquirido su primer Teppaz) datan de mediados de los años 1950, será el transmisor de las músicas caribeñas, como el calipso y el merengue, no poco orgulloso de recibir in situ a miembros de la Fania All Stars, yendo muy pronto a comprar sus discos en San Juan (Puerto Rico) y distribuyéndolos rápidamente en Fort-de-France a través de un establecimiento administrado por uno de sus hermanos. Es también él quien será pronto “todo oído” de la música haitiana, del compás directo y luego de las cadencias que pronto inundarán el mercado. Resultado: numerosos combos que pasaron por su mítico estudio fomentarán la variedad de ritmos “afro-latinos”. Y esto, sin renegar de su identidad: los tambores gwo ka, instrumentos mucho tiempo prohibidos en los circuitos “oficiales”, ocuparán un lugar destacado.

Es esta profusión creativa la que presenta esta selección de catorce temas para una mezcla tan intempestiva como inédita, donde todas las músicas del archipiélago criollo entran en un momento u otro en la pista. Ya sean de esencia rural o de extracción más urbana, todas recuerdan “la huella del canto confiscado por la esclavitud” de la cual hablaba Edouard Glissant en una entrevista sobre el lugar de la música de las Antillas en la esfera afroamericana. “Es el caso del jazz, pero también del reggae, del calipso, de la beguina, de la salsa… Esta huella también se manifiesta en los tambores: guadalupense, dominicano, jamaicano, cubano… Ninguno es igual, todos parten de esta idea de huella, la buscan y se ponen en relación con ella. Eso es la marca de la diáspora africana: esa capacidad de crear lo inédito con respecto a ella misma a partir de una huella. Esto puede ser el recuerdo de un ritmo, la fabricación de un tambor, una manera de hablar que utiliza no la lengua antigua, sino las modalidades de ésta”.

En la apertura, encontramos de esta manera a una de las orquestas emblemáticas de esta identidad estética en las intersecciones de varias músicas de este prolífico archipiélago. Malavoi, mítico grupo foyalais, interpreta en 1974 una magnífica guajira de Ray Barretto, gran tambor de la escena neoyorquina que fue alimentado por Charlie Parker y Chano Pozo. Y como símbolo de esta reunión, la conclusión de esta compilación está firmada por Los Martiniqueños de Francisco. Pilar central de la cultura martiniquesa y militante empedernido de las músicas afro-caribeñas, practicante de las rondas de danmyé (una especie de capoeira) al ritmo del tambor bèlè; este último envía una terrible Caterete, una suerte de champeta compuesta por Francisco. El título también será versionado por los colombianos de Wganda Kenya. La cereza del pastel: el brasileño Marku Ribas, quien encontró refugio en Martinica a principios de los años 1970, da voz a este tema que incita al trance.

Estas dos versiones presentan el diapasón de esta selección, compuesta de rarezas y clásicos del género tropicalizado. Un cóctel que las Antillas no olvidan nunca de sazonar con sus propios ingredientes, acentos tónicos y ritmos elaborados. Tal es el caso de la versión de Dónde, famoso tema cubano compuesto por el productor Ernesto Duarte Brito, con violín típico y la voz picante de Joby Valente, cantante martiniquesa de renombre, y por lo que conocemos, el único disco de 45 revoluciones de Los Caraïbes. En cuanto a L’Ensemble Tropicana, que agrupaba a haitianos como el compositor y líder Michel Desgrottes, su explícito tema Amor en chachachá recuerda a mediados de los años 1960 la persistencia de esta música en los trópicos. Hicieron bailar tanto el Cocoteraie de Guadalupe como la Bananeraie en Martinica. En la misma época, otra banda “extranjera”, el Ryco Jazz del congoleño Freddy Mars N’Kounkou, hizo apariciones notables en las dos islas, recorriendo también los clásicos del latin jazz de la misma manera que la adaptación de Wachi Wara, una soul sauce de Dizzy Gillespie y Chano Pozo. Difícil no precipitarse a la pista con los sonidos entrelazados de cuerdas y percusiones. De la misma manera en la que no podemos resistir a Dap Pinian, un poderoso guaguancó de Eugene Balthazar por la Orquesta Tropicana, publicado en la Maison des Merengues. Todo un símbolo del torbellino en acción.

Bajo el nombre de Paco y L’Orchestre Cachunga, Roger Jaffory se abandona al guaguancó, con Oye mi consejo, un tema inspirado por la Fania. ¡Baila! El baile es también todo el propósito de los Kings – ¡y no menos! – que interpretan Oriza, una bomba puertorriqueña del líder de la Conspiración Ernie Agosto, un clásico de un resplandor bien brillante. Es también en el caldero de los barrios neoyorquinos que La Perfecta, grupo martiniqués originario de La Trinité, encontró su nombre, referencia directa a La Perfecta del totémico Eddie Palmieri. Y es justo aquí que los vemos tomar prestada Toumbadora, del productor y compositor colombiano Efraín Lancheros, donde más que los vientos, son las percusiones las que alimentan el fuego. Diremos lo mismo de los Super Jaguars de Martinica, que toman como pretexto Tatalibaba, una composición del guitarrista cubano Florencio Picolo Santana, hecha famosa por Celia Cruz & La Sonora Matancera, para arrojar cadencias infernales. En un registro más típicamente salsa, el Super Combo, famosa orquesta guadalupeña originaria de Pointe-Noire y formada alrededor de la familia Desplan, Roger Plonquitte y Elie Bianay, adapta Serena, un tema de Roberto Angleró Pepín, compositor, cantante y músico puertorriqueño conocido igualmente por su tema Soy Boricua. Nuevamente aquí, su versión no está lejos de superar la original.

Durante el cambio de los años 1970, L’Ensemble Abricot estuvo el tiempo de un puñado de temas en la cima de este arte de variar los placeres: boleros, beguinas, compás directo, guaguancó y un buen boogaloo, Para siempre, como ellos dicen en coro. El conjunto martiniqués reunido en torno a Léon Bertide sobresale de aquel compuesto por el saxofonista puertorriqueño Hector Santos para el mítico grupo El Gran Combo. Tres años más tarde, en 1972, Henri Guédon aborda Bilongo, popularizado por Eddie Palmieri, con el apoyo de Paul Rosine en el vibráfono. ¡Clásico! Un calificativo que corresponde a los Aiglons de Guadalupe. Siguiendo un tempo más relajado que el original – comenzando por el teclado maravillosamente dispuesto en lugar del acordeón -, reinterpretan Pensando en ti, una composición del dominicano Aniceto Batista. En la etiqueta de uno de los 45 revoluciones más buscados, el primero publicado por Les Aiglons bajo la etiqueta Duli Disc, el título está clasificado bajo la denominación genérica “afro”. Todo un símbolo.

Jacques Denis